La Fondation Daniel et Nina Carasso a lancé, comme tous les deux ans depuis 2015, son appel à projets « Composer les savoirs », s’adressant aux projets qui mettent en lien art, science et société. Dans la continuité de la thématique de 2021, cette 6ème édition, « Composer les savoirs pour imaginer un avenir durable 2023 » valorise des projets artistiques qui impliquent plusieurs domaines de recherche et de pratique dans le but de construire de nouveaux imaginaires permettant à nos sociétés de s’engager dans la transition écologique et d’imaginer un avenir durable.
À travers son axe Art Citoyen, la Fondation accompagne des projets artistiques qui mettent la question des liens sociaux et des préoccupations en commun tout en donnant un pouvoir d’intention aux citoyens grâce à l’Art. Une invitation aux acteurs variés de l’art, de la recherche, des collectivités, des établissements d’enseignement et des associations, à collaborer pour tisser des liens, pour abattre les cloisons de leurs disciplines respectives pour constituer un maillage de connaissances en vue de construire de nouveaux imaginaires.
Cette promotion, qui succède à celle de 2021, a rencontré un écho considérable, avec un total de 146 projets reçus, parmi lesquels 95 étaient éligibles. Un tableau coloré de propositions ambitieuses s’est ainsi dessiné, témoignant d’un intérêt fort pour ces enjeux. 15 projets ont finalement été retenus. Ces projets sont autant d’incarnation de l’envie de dépasser les domaines d’expertise pour se retrouver face à l’importance des défis qui se dressent devant nous. À l’heure où la transition écologique nous impose de réinventer nos modes de vie, ces initiatives sont autant de graines plantées dans le terreau fertile de notre société ; elles façonnent ensemble notre cheminement vers un avenir durable.
« Le dérèglement climatique nous impose de penser des synergies entre disciplines pour créer des connaissances nouvelles et in fine des récits inspirants en vue de concevoir un futur meilleur. C’est tout l’objet de cette nouvelle édition de « Composer les savoirs » qui, pour la deuxième édition consécutive, s’est tourné vers la crise écologique. Nous avons noté un fort intérêt pour la création de spectacles vivants, pour la thématique du littoral ainsi que pour les synergies avec les écoles d’art et les universités. » affirme Klaus Fruchtnis, Responsable de l’axe Art Citoyen en France.
Les quinze lauréats de l’appel à projets « Composer les savoirs pour imaginer un avenir durable 2023 »
Un jury composé d’experts du monde de l’art et de la recherche s’est réuni le 4 juillet 2023 pour délibérer sur les projets présentés. Pour favoriser l’émergence de ces nouveaux modèles de construction du savoir, ces derniers ont été évalués en fonction de leur pertinence face aux enjeux contemporains et de leur capacité à mobiliser différentes disciplines dans un élan commun pour un avenir durable.
Pour cette édition, les projets devaient relever d’une démarche artistique et porter des problématiques environnementales, en co-construction entre artistes et scientifiques. Ils devaient en outre être éco-conçus, et leur diffusion, publique.
Les critères pour la sélection de projets engagés dans la transformation écologique par le pouvoir de l’art
Parmi les critères de sélection, les projets devaient notamment aborder les problématiques environnementales de manière engagée, en proposant des démarches artistiques novatrices.
Cet appel à projets offre une occasion unique de repenser notre rapport au monde, d’explorer de nouvelles voies et de nourrir notre imagination collective. Il incarne la volonté de la Fondation Daniel et Nina Carasso de mobiliser les ressources créatives et intellectuelles pour façonner un avenir durable, où l’art joue un rôle central dans la transformation de nos sociétés.
Merci aux membres du jury de l’appel à projets Composer les Savoirs 2023
Nous tenons à remercier les membres du jury, experts bénévoles qui nous ont aidé à sélectionner ces projets avec curiosité et bienveillance. C’est grâce à leur expertise que ces projets ont pu être sélectionnés. Leurs regards croisés, nourris par leurs expériences, ont façonné cette mosaïque de projets porteurs d’espoir.
Les 15 projets en détails
Cette série de projets prometteurs, puisant leurs racines au croisement de l’art et des sciences, ont en commun leur engagement pour un futur plus durable :
• Musée pétrifié (Lighthouse Company)
« Le Musée pétrifié » est un projet de recherche action au plateau porté par la compagne théâtrale The Lighthouse company à partir d’un corpus d’archives de la British Geological Survey (BGS) située dans le nord de l’Angleterre à Nottingham : la plus grande collection au monde de spécimens géologiques collectés depuis 1835. Le projet qui aborde un sujet peu traité dans le milieu théâtral, le monde minéral, réunit des compétences aussi variées que le design, la performance, les sciences humaines et expérimentales. Ils y ont élaboré un trio d’expériences : une déambulation dans une exposition, un espace de pratiques laborantines et un spectacle, une chorégraphie onirique destinée au jeune public
• Il existe un autre monde et il est dans celui-ci (La Turbine)
L’association la Turbine, collectif nantais, regroupe une dizaine d’artistes, chercheuses et chercheurs, reportrices et reporters qui souhaitent mettre en mouvement les individus et les organisations pour créer un futur désirable à travers des récits et des expériences artistiques et scientifiques. En 2023-2024, les membres du collectif s’attèlent à développer 3 projets de territoire dans un maillage Arts et Sciences avec une dimension citoyenne dans la participation : « Océan, Paysage mouvant », une performance alliant danse et biologie ; « Des mots pour demain », un atelier de prospective créative et participative sur les enjeux de transition ; « Créations sonores et sessions d’écoute », une collecte de paroles auprès de jeunes et d’adultes, sur les thématiques du genre, de l’utopie et du corps.
• Rétrofutur : nouveaux récits et outils pour une transition participative (Atelier 21)
Atelier 21 porte le programme de recherche Paléo-Énergétique qui compile une vision rétrospective sur notre histoire énergétique commune pour en tirer des enseignements et servir la transition énergétique à l’aide de l’intelligence collective. « Rétrofutur » est une déclinaison qui vise, à travers des ateliers d’idéation, à associer 3 structures partenaires pilotes (une École d’enseignement supérieur, une collectivité et une entreprise), un comité scientifique et un artiste autour d’un programme commun pour confronter et compléter leurs approches prospectives sur la transition énergétique. Imaginé comme une expérimentation d’intelligence collective, l’objectif de ce projet est de développer un outil participatif pour envisager le monde de 2025-2050.
• A l’école Chazelet (Les Augures)
Dans un hameau de montagne, le projet « A l’école du Chazelet » cherche à créer un lieu qualifié de commun pour travailler aux enjeux croisés de la culture, de l’écologie et de la montagne. Ce projet vise à réhabiliter l’ancienne école du hameau pour en faire un lieu de résidence d’artistes, un espace de rencontres et de débats, un lieu culturel pour et avec le village et ses habitants. Les Augures conçoit ce projet comme une vitrine, un manifeste pour la nécessaire transition écologique du secteur de la culture.
• Trilogie montagnarde (Scènes Obliques)
Dans le massif de Belledonne, près de Grenoble, cette recherche-action se déploie du piémont au sommet de la montagne, pour lancer une réflexion associant des chercheurs et des habitants autour de la montagne comme milieu de vie. S’articulant autour de 3 projets artistiques, elle vise à imaginer le devenir des montagnes non seulement dans l’Isère, mais également ailleurs dans le monde. Cette première étape est destinée à inaugurer un « espace culturel international de montagne » (ECIM).
• Orée. Enquête ethnographique multimédia sur des interactions entre les paysages agricoles et forestiers dans le Haut Beaujolais (Tillandsia)
Ce projet interroge à la fois le modèle industriel qui domine la foresterie et l’agriculture du Haut Beaujolais et met en lumière des alternatives qui permettent de restaurer la biodiversité et l’équilibre paysager. Sous la forme d’une enquête ethnographique filmée au cœur des paysages forestiers et agricoles du nord du département du Rhône, un documentaire de création et une exposition multimédia mettant en lumière les enjeux environnementaux de ce territoire et le regard que ses habitants lui portent.
• Cinéma sur les ruines du futur (Echelle Inconnue)
Porté par Échelle Inconnue, association basée à Rouen, explorant par des recherches-actions au long cours la face cachée de la fabrique des villes, déclenché suite à l’incendie de l’usine Lubrizol (2019), le projet Cinéma sur les ruines du futur vise à décrypter l’envers du décor des processus de réindustrialisation de l’Axe Seine. Production d’un cahier documentaire, vidéomaton poétique, résidence d’auteurs en charge d’écrire des dystopies, invitation de chercheurs, débats avec des collectifs citoyens se combinent pour élaborer collectivement d’autres savoirs et d’autres récits, à rebours des discours sur la métropole vertueuse. In fine, l’ensemble de ces démarches aboutira à la production d’un film.
• Pont Ver(t)s (Le Citron jaune, Centre national des Arts de la Rue et de l’Espace Public)
Cette initiative du Citron jaune et de l’artiste Thierry Boutonnier sème des graines d’innovation à Port Saint Louis du Rhône. Dans le contexte d’une commune exposée aux externalités du complexe pétro-industriel de Fos-Marseille, cette œuvre végétale participative croise des enjeux de précarité alimentaire et de pollution des sols. Artistes, chercheurs, acteurs sociaux, habitantes et habitants œuvrent à la plantation de vergers au sein des quartiers politique de la ville. Ces balises nourricières composées, plantées et cultivées de façon collaborative visent à changer notre rapport sensible aux arbres tout en expérimentant des modalités innovantes d’agriculture urbaine adaptées aux milieux pollués. Cet acte collectif doit aboutir à la première production d’huile d’olive de Port Saint Louis du Rhône d’ici 2025.
• Nouveaux récits pour un nouveau monde (La filature du Mazel)
La Filature du Mazel, en présentant « Nouveaux récits pour un nouveau monde », propose un projet collaboratif qui s’articule autour des défis écologiques des Cévennes, dans une démarche inclusive. Elle articule l’intervention d’artistes et de scientifiques dans une optique de sensibilisation du grand public pour transformer les imaginaires et mettre en action. L’art comme outil de vulgarisation scientifique à travers diverses formes de créations artistiques et événements culturels, pour contribuer à la construction « d’un nouveau monde », pour refaire société avec la Terre.
• Être(s) situé(s) : de la source aux confluences (Le Dancing – Centre de développement chorégraphique national Dijon BourgogneFranche-Comté),
Un projet de laboratoire in situ, sur 3 ans, pensé avec et autour du travail de l’artiste chorégraphique, pédagogue et chercheur en danse Laurent Pichaud, invité comme artiste associé au Dancing. Il engage également un multi partenariat entre écoles de l’enseignement supérieur (Master international Exerce, École Nationale Supérieure de Paysage de Versailles-Marseille), artistes, habitant·e·s et associations locales investies dans le champ de l’environnement. Il se déploie autour de trois moments du festival « Entre cours et jardins » et s’inscrit dans une démarche de création en situ, avec l’eau comme fil rouge du projet.
• Hydromonde en Brière (Slow Danse),
Le projet utilise l’art comme moyen de sensibilisation écologique dans les territoires communaux et intercommunaux du département de Loire-Atlantique. Grâce à des projets d’infusion artistique, l’association invite à une réflexion poétique et sensible sur les enjeux environnementaux locaux. Celle-ci prend la forme de semaines de résidences sur plusieurs mois suivi d’un temps « évènement » permettant la mise en récit et en espace du terrain investi et de ses enjeux
• Des lianes aux algues (La Compagnie, lieu de création)
La Compagnie, lieu de création nous invite à explorer les mystères du règne végétal avec son projet envoûtant intitulé « Des lianes aux algues ». Inspiré par l’œuvre de Dénetem Touam Bona, ce voyage artistique transcende les frontières culturelles pour révéler les liens profonds qui unissent l’homme et la nature. Telles des cordes vibrantes, les lianes deviennent des alliées dans la lutte contre la marchandisation du vivant, symboles de résistance et de sagesse subversive.
• ARTLABO RETREAT : Ecologies insulaires (Association Ultra)
Des artistes et des scientifiques se réunissent pour explorer les enjeux sociaux et écologiques qui sont ancrés dans les terres insulaires au contexte géographique sensible. Le projet s’inscrit dans une perspective pérenne au croisement de démarches scientifiques et artistiques (sur les Iles de Batz, Ouessant et Molène). Ils tissent des liens entre les connaissances ancestrales et les innovations contemporaines, invitant chacun à repenser sa relation à ces écosystèmes. À travers des résidences de recherche-création, ils redessinent le rapport à l’environnement en l’appréhendant comme un ensemble de relations dont le maillage constitue une écologie relationnelle. L’objectif est de produire des savoirs générant de l’autonomie, de la diversité et du partage.
• En transition (Association Rezonance),
Ce projet explore le champ fertile de l’agroécologie. Par le biais de l’audiovisuel participatif, des artistes engagés collectent des récits et des images pour mettre en lumière les acteurs du changement dans le monde agricole, soucieux de la sauvegarde des savoir-faire paysans et de la durabilité de l’espace agricole. Leur démarche créative, nourrie par la collaboration avec les communautés locales, offre un regard authentique sur les défis et les réussites de la transition agroécologique. A travers un dispositif d’installation immersive conçu pour une diffusion large, ils plantent les graines de la conscience collective en interrogeant sur les enjeux sociétaux de nos choix de consommation.
• Mémorimages (ABERS LAB – Ateliers Bretagne Ecole Regard et Sciences)
L’Association cherche à renouveler le rapport à l’environnement en recréant du lien entre des générations partageant un territoire commun, marqué par l’amnésie environnementale – résultat d’une rupture tant générationnelle que dans le lien entretenu avec l’environnement. À travers des ateliers de création animés par des artistes et des scientifiques, les jeunes générations se retrouvent aux côtés des aînés pour partager des histoires et des souvenirs, révélant ainsi la richesse de notre patrimoine environnemental commun. En s’appuyant sur des films d’archives de la Cinémathèque de Bretagne et des récits personnels, ces rencontres ouvrent une fenêtre sur notre passé, ravivant la mémoire collective et renouant les liens avec notre environnement.
Le croisement des disciplines comme catalyseur pour une transformation durable de nos sociétés
Les projets lauréats de cet appel à projets reflètent la diversité des domaines d’intervention et l’ampleur des enjeux auxquels nous faisons face. Des solutions émergent pour des problématiques environnementales, sociales et économiques pressantes.
Au fil des années, cet appel à projets s’est imposé comme catalyseur d’innovation dans le champ des arts et sciences. Les différents acteurs ont récemment eu l’opportunité de partager leur retours d’expérience lors d’un webinaire binational. Ce webinaire, qui s’est tenu le 21 février, a permis d’enrichir la réflexion collective et de favoriser les collaborations fructueuses par-delà la frontière franco-espagnole.
Nous vous invitons à découvrir le Carnet Carasso Apprentissages « Composer les Savoirs ». Il rassemble les réflexions et les enseignements tirés de vingt-cinq projets sélectionnés et permet de saisir la valeur ajoutée des collaborations entre les différents acteurs et d’explorer les enjeux contemporains liés à la construction d’un avenir durable.